Le livret A est trop intéressant : la Cour des comptes préconise de baisser son plafond (22.950 euros aujourd’hui) et de taxer l’épargne au-delà

Cour des compte

Le Livret A se retrouve au cœur d’un débat, alors que la Cour des comptes juge son attrait excessif. L’institution estime que ce placement défiscalisé dépasse sa vocation d’épargne de précaution. Elle propose de revoir son plafond et de limiter l’avantage offert aux montants les plus élevés. Cette remise à plat viserait à mieux cibler le soutien public vers l’épargne réellement destinée aux coups durs.

Les chiffres du Livret A inquiètent la Cour des comptes

Selon bfmtv.com, près de 58 millions de personnes détiennent un Livret A, soit environ 83 % des Français. L’encours total approche 440 milliards d’euros, pour une épargne disponible à tout moment et garantie par l’État. Le capital reste également totalement exonéré d’impôt et de prélèvements sociaux.

Chaque titulaire peut déposer jusqu’à 22 950 euros sur son livret, sans compter les intérêts capitalisés. Ceux-ci peuvent faire dépasser le plafond réglementaire tout en conservant l’exonération d’impôt. Selon la Cour des comptes, ce mécanisme déborde la simple épargne de sécurité destinée aux coups durs financiers.

Le produit ne sert plus seulement de matelas pour les imprévus, mais aussi de placement pour des ménages aisés. Rattaché à la haute juridiction financière, le Conseil des prélèvements obligatoires propose un plafond ramené à 19 125 euros. Le Livret de développement durable et solidaire serait relevé au même niveau pour rester aligné.

Pourquoi la Cour des comptes veut restreindre l’avantage fiscal

Pour l’institution, l’exonération fiscale des livrets réglementés se justifie d’abord pour une épargne de précaution. Elle doit couvrir les dépenses imprévues et les chocs de revenu qui fragilisent les ménages. Les mouvements fréquents enregistrés sur ces comptes confirment cet usage de court terme pour une partie des titulaires.

Le problème apparaît lorsque plusieurs livrets réglementés se cumulent dans un même foyer, avec des plafonds élevés. L’épargne atteint alors des montants très importants, au-delà d’une simple réserve de sécurité, et s’apparente à un placement privilégié. La Cour des comptes juge que ce traitement fiscal devient moins équitable entre contribuables.

Le rapport évoque un couple avec trois enfants dont Livret A, LDDS et livrets jeunes totalisent 143 550 euros. Ce montant représente plus de deux années de revenus moyens pour ce type de ménage. À ce niveau, l’épargne relève davantage d’une stratégie patrimoniale que d’un simple coussin de sécurité.

Des conséquences mesurées pour les épargnants et les finances publiques

Le Conseil des prélèvements obligatoires veut rapprocher la fiscalité des supports d’épargne. Il veut éviter qu’un produit réglementé paraisse plus avantageux que les placements imposés dès le premier euro. Cette réflexion intervient alors que les finances publiques restent contraintes et les marges de manœuvre limitées.

Le manque à gagner lié à l’exonération des intérêts des livrets réglementés atteint 5,6 milliards d’euros cette année. Une fiscalisation au-delà de 19 125 euros sur Livret A et LDDS est envisagée. Cette mesure pourrait rapporter environ 150 millions d’euros. En conservant les plafonds actuels, le gain serait proche de 80 millions d’euros.

Les auteurs soulignent que ces recettes resteraient modestes au regard du coût global du dispositif. Une partie des épargnants retirerait sans doute les sommes excédentaires pour éviter l’impôt, ce qui réduirait le rendement. La Cour des comptes ouvre ainsi un débat entre soutien à l’épargne populaire et équilibre des comptes publics.

Un arbitrage délicat entre épargne populaire et équilibre budgétaire

Ces propositions ne remettent pas en cause l’existence du Livret A, mais interrogent sa place dans la politique d’épargne. Elles invitent à mieux cibler le soutien fiscal sur les montants réellement liés à la précaution. Le gouvernement devra arbitrer entre stabilité pour les épargnants et ajustements défendus par la Cour des comptes. Le débat public portera aussi sur la façon de préserver la confiance tout en maîtrisant la dépense fiscale.

Retour en haut